sortilèges

Principes de magie d’amour

Quiconque connaît un peu la magie et toute la culture qui s’y rapporte peut constater plusieurs choses : d’abord, la magie est universelle, et il est donc possible de trouver des recettes, des formules dans toutes les civilisations. Ensuite, la magie possède des règles, des formules particulières qu’il faut toujours respecter scrupuleusement car elles correspondent à une symbolique très précise censée contraindre l’univers à se mettre en marche pour exaucer le désir de celui qui l’a utilisée.

Un autre point particulier à l’univers de la magie est son caractère éparpillé. Ainsi, il peut être facile de trouver des livres de magie assez anciens et publiés s’ils sont assez célèbres, on peut aussi trouver des livres d’historiens très sérieux ayant étudié le phénomène et donc relevé certaines formules et pratiques, mais globalement, la magie relève plutôt d’une culture du privé, du secret, de choix personnels, voilà pourquoi un livre de magie même célèbre peut consister en des mélanges sans cohérence de formules venues de partout dans le temps et dans l’espace en fonction de ce qui aura plu à celui qui les aura retranscrites.

La magie, c’est aussi, malgré ses règles strictes, un ensemble de pratiques où peut entrer une part de créativité parce que chaque demandeur est unique, mais où la loi principale, inchangée depuis les débuts de la magie, considère que ce qui est en bas est comme ce qui en haut et que, mimer son désir ou le mettre en scène de façon symbolique en donnant son nom, en invoquant les bonnes divinités ou juste en faisant les bons gestes avec les bons objets forcera l’univers à l’exaucer. La magie rend actif le désir qui ne fait pas que consumer celui qui l’éprouve mais le rend créatif et injonctif pour que ce désir soit contagieux.

Rituel d’amour de l’Egypte antique

« Quand tu désires qu’une femme aime un homme, 

Tu prends la sève d’un arbre-her;

Tu prononces leur nom exact devant eux.

Tu la mets dans une coupe de vin ou de bière;

Tu la donnes à la femme pour qu’elle la boive. »

( Charme issu d’un papyrus du III ème siècle dans Chants d’amour de l’Egypte antique )

La magie, c’est aussi de la mythologie qui se rejoue symboliquement par certains actes, une imitation de la vie des dieux dont l’efficacité doit pouvoir reposer sur la similitude. Puisque les dieux ont créé l’univers et le manifesté, en faisant des choses semblables à ce qu’ils ont fait, le désir devrait logiquement se réaliser car comment le dieu pourrait-il être insensible à un tel hommage ? Une formule magique, c’est donc toujours l’expression d’un ordre, mais aussi parfois, l’évocation, l’hommage, ou l’imitation de l’acte d’un dieu. Et dans la magie d’amour s’y ajoute très souvent de l’organique, du fluide, du vivant.

Rituel d’amour sumérien ancien

« Je te frappe sur la tête, perturbant ton esprit

Que ma volonté soit ta volonté

Que ma décision soit ta décision

Je te possède comme Ishtar a possédé Dumuzi

Comme la bière attache celui qui la boit

Je t’ai attaché avec ma bouche chevelue

Avec mon vagin ruisselant de liquide séminal

Avec ma bouche qui salive

Avec mon vagin ruisselant de liquide séminal

Aucune rivale ne se mettra entre nous. »

(1974-1954 av. J-C. V. Grandpierre. Sexe et amour, de Sumer à Babylone)

Si on fait appel à une divinité, il est très courant de manifester son intention, son nom, le nom de la personne désirée, utiliser des parfums, représentations ou symboles qui lui sont associés.

Rituel Babylonnien ancien

Prenez une grenade ou une pomme, belle et appétissante, isolez-vous dans une pièce sans lumière et sans témoins, et dites :

« La plus belle des femmes a inventé l’amour ! Ishtar, qui se délecte des pommes et des grenades, a créé le désir. Monte et descends, pierre d’amour, entre en action à mon avantage. C’est Ishtar qui doit présider à notre accouplement. »

Réciter trois fois sur le fruit consacré à la divinité et faire croquer à la personne désirée.

( Jean Botéro. Amour et sexualité à Babylonne )

Et parce que c’est une culture à part, intemporelle et marginale, les livres de magie, ça peut aussi nous offrir la surprise de voir conservé le fragment d’un livre célèbre qu’on a toujours évoqué sans jamais prouver qu’il existait vraiment et qui a donc plus l’air d’un mythe que d’une réalité. La recette mystérieuse, la voici :

« Il est écrit dans le livre de Cléopâtre qu’une femme qui n’est pas contente de son mari comme elle souhaiterait n’a qu’à prendre la moelle du pied gauche d’un loup et la porter sur elle, il est certain qu’elle en sera satisfaite et qu’elle sera la seule qu’il aimera. »

( Alexandre Legran.Les vrais secrets de la magie noire : applications.)

Dans le labo de Cléopâtre : Cléopâtre et son célèbre bain au lait d’ânesse

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Magie d’amour et cheveux

A la grande honte de l’Europe très civilisée, et notamment de la France dont le cartésianisme fait la fierté, nous avons connu une longue période durant laquelle la magie fut pratiquée. Le problème est qu’elle ne fut pas pratiquée que par des ignorants, comme on veut parfois nous le faire croire, mais aussi par les plus grands savants. Et c’est surtout au pays de Descartes qu’on refuse de savoir que les plus grands scientifiques, comme Einstein ou Freud, entretenaient un rapport particulier à l’esprit et à la matière et avaient des pratiques superstitieuses et magiques. Newton, plus ancien, s’adonnait avec fièvre à l’alchimie.

Dans ces pratiques, surtout celles de la magie d’amour, Aphrodite, Vénus, ont été très présentes, mais les cheveux ont également tenu une place de choix.

Si vous passez par ici, préparez-vous à un voyage au coeur de pratiques qui se sont transmises dans tous les ouvrages spécialisés d’Europe, et qui, en délit de désuétude et d’absurdité ont fait la honte de l’Europe avant de devenir le fonds de l’imaginaire de la société de loisirs qui y puise l’inspiration pour ses romans, films et séries fantastiques, ses jeux video, etc.

Les sortilèges qui suivent viennent du livre d’Alexandre Legran ( un pseudonyme, sans doute ), Les vrais secrets de la magie noire, applications, non daté mais certainement du XIX ème siècle, et qui reprend les sorts de livres plus anciens comme ceux du Grand et Petit Albert, qui datent du Moyen-Age. On trouve cet ouvrage sur le site de la BNF, l’excellent Gallica.

Quelques pratiques divinatoires

– «  La veille de la Saint Pierre, choisir 5 clés. Faire avec ses cheveux une natte à 3 mèches dont on attache les extrémités en en faisant 9 noeuds après les avoir passés dans les têtes de 9 clés. Lier le tout ensemble au poignet gauche au moyen de la jarretière de la jambe gauche et serrer l’autre jarretière sur le front en invoquant :  » St Pierre ne vous courroucez pas. Pour essayer votre faveur, j’ai agi de la sorte. Vous êtes le seigneur des clés, exaucez-moi, je vous en prie; donnez-moi la preuve de votre pouvoir; et faites-moi voir mon amant et mon futur époux. Amen. »

Ici, les cheveux de la personne la symbolisent tout entière, elle et sa destinée. Le noeud autour du poignet gauche, région d’habitude dévalorisée, représente le lien avec la région du coeur. Saint Pierre ouvre les portes du Paradis, et donc, pourquoi pas, celles du Paradis sur Terre qu’est l’amour ? La pratique semble demander au moyen de symboles :  » Qui m’emmènera au Paradis ? »

 » La nuit de vendredi qui précède le dimanche de la Quasimodo, pars seule en secret pour un carrefour à 4 chemins dans la campagne. Arrivée là, défais ta chevelure et rejette tes cheveux en arrière, comme les portaient autrefois les prophétesses en Celtide. Tu auras pris à la maison une aiguille qui n’aura jamais servi et te piquant le petit doigt de la main gauche, tu laisseras tomber 3 gouttes de sang sur le sol en répétant à chaque fois :  » Je donne mon sang à celui que j’aime, que je vais voir et qui sera à moi. » Alors la forme de ton futur s’élèvera doucement pour s’évanouir aussitôt qu’elle sera formée. »

La suite consiste en remerciements aux esprits élémentaires et le livre précise bien qu’il ne faut en manquer aucune prescription sous risque d’accident mortel.

Il y aurait bien des choses à dire sur le rite du sang et l’installation à un carrefour, mais restons-en aux cheveux. Ici, ils ne sont qu’un cliché, le fantasme projeté de la prophétesse Celte qu’on n’a pas connue et qu’on s’imagine seulement, mais c’est pourtant ce qui permettra l’identification grâce à l’état modifié de conscience.

Quelques sortilèges

D’après Papus, célèbre mage du XIX ème siècle, le philtre d’amour se théorise. Il faut frapper l’imagination de la personne qu’on veut atteindre et fixer son fluide magnétique grâce à des substances qui les condensent comme le sang, les cheveux, etc. Si quelqu’un a compris…

– «  Pour que la personne dont vous possédez l’amour vous soit fidèle, prenez une mèche de ses cheveux, brûlez-la et répandez-en la cendre sur le bois de son lit après l’avoir frotté de miel. Elle ne rêvera que de vous. »

Ici les cheveux sont brûlés, comme si on voulait anéantir la personnalité potentiellement trop rebelle de l’être aimé. Dans la magie d’amour, les cheveux valent pour des substances aussi personnelles que sang, sperme et salive, tout ce qui nous fait accéder facilement à notre carte d’identité interne : l’ADN. On brûle sa volonté, on l’adoucit par le miel en on crée une enceinte autour de son lit pour qu’elle ne puisse s’échapper.

« Prenez 5 de vos cheveux, unissez-les à 3 de la personne que vous aimez et jetez-les dans le feu en disant :  » Ure, igne, Sanctis Spiritus, renes nestros et cor nostrum, Domine Amen. »

Cinq cheveux contre trois pour signifier peut-être une domination de la personne qui aime sur celle qui est aimée. La phrase en latin se retrouve très habituellement dans les missels et demande à ce que nos reins et coeurs soient brûlés, ce qui, tourné de façon métaphorique, évoque l’amour : « le coeur » et la sexualité : « les reins ».  En détournant la prière chrétienne pour un projet profane et amoureux, on s’assure ici du concours dérobé de la puissance divine puisque les mots sont d’habitude récités dans de pieuses intentions. Les cheveux brûlés de chacune des personnes destinées à faire un couple valent pour un acte en mimant symboliquement la chose demandée.

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