Aphrodite au Labo de Cléopâtre

Aphrodite a toujours été la souveraine de ce blog qui m’a conduit plus loin que je n’aurais pu l’espérer. Elle est ma source d’inspiration de longue date et semble avoir guidé tous mes pas. Dans la boutique du Labo de Cléopâtre, elle est évidemment très présente à travers ses parfums historiques et ses plantes consacrées.

Elle a encore accompagné la publication de mon livre Fabriquez vos soins naturels de l’Antiquité, grâce au porte-encens Aphrodite au coquillage que j’ai entièrement réalisé sur base d’éléments entièrement naturels – la petite statue exceptée. Une figure qui est devenue mascotte de mon travail par le choix qu’en a fait Céline Morange, directrice de la publication et photographe chez Améthyste.

Néanmoins, la déesse était déjà mon guide, et pensant à ceux et celles qui, comme moi, la portent dans leur cœur tout en ne trouvant pas assez d’objets évoquant son culte et l’ancienne religion, j’avais décidé de créer quelques objets artisanaux.

Il n’y en a pas des tonnes, ce sont souvent des exemplaires uniques, mais vous trouvez sur la boutique du Labo de Cléopâtre quelques pièces dans la lignée d’Echodecythere et mon amour premier pour la belle Cythérée. Parfois, plus que discrets, ils ne se remarquent pas..Et parfois, l’hommage est très clair.

J’ignore si ça a du sens pour vous, mais quand j’ai appris qu’Aphrodite était aussi la déesse des parfums, le lien du blog Echodecythere au projet Labo de Cléopâtre m’a semblé un petit clin d’œil divin. On n’est pas obligé d’y croire, ni même aux anciens dieux, mais pour moi, les choses sont différentes…

N’y a-t-il que des roses dans les produits consacrés à Aphrodite ? Non, mais vous ne ferez jamais une faute à son égard en lui en offrant, car il y en a malgré tout souvent. Est-ce à dire que c’était aussi simple que la symbolique associée à la magie d’amour d’aujourd’hui ? Et bien, là encore, non.

Le culte à Aphrodite, c’était une culture riche, totale, de dévotion mais qui prenait racine dans son lieu d’apparition : les symboles marins lui sont associés, mais aussi les colombes de son char – d’où peut-être plus tard la colombe comme symbole de la paix.

Enfin, Aphrodite, ce sont les coquillages, les bijoux, les parfums de toutes sortes, la séduction, la nudité, mais aussi la gentillesse et le sourire.

Aimez-la follement et aimez follement, c’est encore le meilleur que je peux vous souhaiter dans cette période de fous !

D’autres encens consacrés totalement ou partiellement à Aphrodite se cachent encore dans la boutique du Labo de Cléopâtre. N’hésitez pas à la visiter si vous en êtes curieux. https://www.etsy.com/fr/shop/Lelabodecleopatre?ref=seller-platform-mcnav

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Fabriquez vos soins naturels de l’Antiquité

Vous suivez ce blog et êtes déjà intéressés par mon travail depuis longtemps ?

Si vous voulez en apprendre plus, sachez que mon projet s’est aussi incarné dans un livre qui sortira ce 27 mai 2021 chez Améthyste, du groupe Alliance Magique. Et déjà en prévente à partir de ce jeudi, avec un marque-page offert pour les 50 premières commandes.

Qu’est-ce que vous allez retrouver dans ce livre ? Exclusivement des recettes de beauté datant authentiquement de l’Antiquité, que j’ai cherchées dans les livres anciens pendant des années. Ces recettes concernent toutes ce qu’on peut appeler la médecine ancienne de notre civilisation.

Oui, il y a dedans des recettes de Cléopâtre, la reine d’Egypte ayant aussi été une référence médicale au point que les médecins compilateurs ont conservé quelques-uns de ces écrits en les copiant et citant leur origine.

Mais il y sera surtout question de beauté, hygiène, soins et parfums. Vous vous demandez comment les Anciens nettoyaient leur visage, leurs cheveux, leurs dents, comment ils teignaient leurs cheveux ou se maquillaient et comme ils prenaient soin de leur peau ?

Je vous le raconte dans ce livre en vous , de manière très facile et accessible, vous donnant la possibilité de faire de même. C’est donc à un voyage dans le temps et en beauté que je vous invite avec cet ouvrage. Une dimension que vous connaissez bien si vous suivez le blog du Labo de Cléopâtre depuis longtemps.

Un voyage où ne sont invitées que des matières premières, principalement végétales et quelquefois dérivées d’animaux mais dont vous avez l’habitude comme la cire ou le miel.

Ce sera aussi l’occasion de comparer avec les autres cultures traditionnelles des soins de beauté : monde indien et arabo-musulman.

Alors, je vous embarque ?

Les photos et illustrations sont toutes de Céline Morange et de son équipe au sein d’Améthyste, du groupe Alliance Magique.

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Partez découvrir les secrets de beauté au temps de Cléopâtre avec Fabriquez vos soins naturels de l’Antiquité ! Avec cet ouvrage, vous apprendrez à confectionner vous-même vos propres soins naturels avec des ingrédients accessibles, le tout accompagné de nombreuses références historiques. ❤️

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Cet article est la propriété du site Le labo de Cléopâtre, les photos sont la propriété de Céline Morange pour Alliance Magique.

Aphrodite et la prison de la frivolité

Un passage de la mythologie raconte une anecdote à propos de la déesse de l’Amour et de la Beauté. Un jour, celle-ci essaya le travail et se mit à la tapisserie. Scandalisée, Athéna alla se plaindre à son père Zeus. Elle était la déesse associée aux travaux d’aiguille – travail malgré tout essentiellement féminin – et il n’était pas question qu’Aphrodite empiète sur son domaine. Zeus donna raison à Athéna, et on ne vit plus jamais Aphrodite faire quoi que ce soit de ses mains qui ressemblait à du travail.

Le récit mythologique répartissait donc ainsi les rôles, entre la femme qui est belle et sert à embellir le monde en obéissant strictement aux règles définissant sa place – « Souris sur les photos », « Tu es tellement plus belle quand tu souris »-, et celle qui fait, agit au risque de faire peur au monde, de la priver de sexualité et de risquer d’être considérée comme marginale dans la société.

En grandissant, quand apparaissent les caractères sexuels secondaires, ce choix se présente à toute jeune fille qu’on trouve assez désirable pour la pousser à la sexualité. Que sera-t-elle ? Belle, frivole, et agréable à fréquenter, ou studieuse, ambitieuse et donc non disposée pour l’homme qui pourrait la désirer ?

C’est l’histoire d’une jeune fille qui ne se trouvait pas très jolie et qui regardait avec envie et jalousie la plus jolie fille de sa classe après qui tous les garçons couraient. Elle ne voulait pas spécialement qu’on lui courre après, mais elle voulait juste parfois avoir l’impression d’exister dans une société où il y a le sexe fort et où sa façon de représenter le sexe faible ne correspond pas à l’image qu’on désire en avoir.

Dans son traité sur l’éducation, Rousseau dit en 1762 : « Toute l’éducation des femmes doit être relative aux hommes. Leur plaire, leur être utiles, se faire aimer et honorer d’eux, les élever jeunes, les soigner grands, les consoler, leur rendre la vie agréable et douce. »

Le doux contre le fort, le sexe fort, qui agit, le sexe faible – aussi appelé beau sexe, en référence à la beauté qu’on associe au féminin et à la force, qu’on associe au masculin – qui grandit à l’ombre des tentations qui la feraient passer du côté des femmes qu’on dit paradoxalement « libres », c’est-à-dire les prostituées, qui seules, avaient le droit d’avoir de l’argent bien à elles.

Si cette vision de la femme est très associée dans notre imaginaire aux religions monothéistes, les mythes grecs ne laissent pas de place au doute quant aux rôles bien définis des uns et des autres Olympiens selon leur sexe : ceux qui agissent et décident sont masculins (Zeus, Poséidon, Hadès, Hermès, Apollon…), sont féminins ceux qui subissent (Perséphone, Héra, Aphrodite) ou qui s’écartent du jeu matrimonial ou sexuel pour ne pas subir (Athéna, Artémis).

Le monde d’Aphrodite – plus qu’aucune autre – c’est effectivement l’empire statique de la frivolité. Tout comme les textes anciens nous décrivent longuement la déesse de la Beauté qui, éprise d’Anchise, met ses plus beaux vêtements et bijoux, pour aller à sa rencontre, le cinéma, les réseaux sociaux, les clips musicaux sont pleins d’images de femmes et filles qui, apprêtées, maquillées, sur-sexualisées et esthétisées, semblent prêtes à se perdre dans leur propre image d’elle-même et le désir qu’elles inspirent.

C’est l’histoire d’une fille qui fait de l’art avec ses mains et le diffuse sur les réseaux sociaux pour ne gagner qu’une dizaine de like quand une autre en gagne près de 200 avec juste une photo d’elle en décolleté ou en tenue sexy. A cette dernière – celle qui fait ce qu’on désire d’elle – la plus grande distribution de dopamine !

Cette façon de voir le monde entre masculin et féminin perdure partout dans le monde – et même chez ceux qui se croient assez intelligents pour y échapper – lui assurant une stabilité rassurante pour les uns plus que pour les autres, mais malgré tout plusieurs fois millénaire.

Tant que tu es jeune et belle, séduis ! Tiens le rôle qu’on donne à la femme par excellence, puisque tu es née femme ! « Quand vous serez bien vieille, Hélène, assise au coin du feu (…)Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle… » Hélène a eu l’audace de ne pas faire ce que Ronsard attendait d’elle. Elle ne profitera pas du plaisir et des honneurs qui ne reviendraient de toute façon qu’à lui, de qui on admet la sexualité libre et la conquête, quand on la condamnerait chez elle.

Aux femmes le monde du maquillage, de la mode, de la beauté et de la frivolité ? En fait, non. Aux uns et aux autres le monde et la place que la société et les proches acceptent de leur céder et leur reconnaît, en fonction de leurs croyances, leur culture et leur ouverture d’esprit.

La mythologie raconte aussi qu’Héphaïstos avait décidé de piéger Aphrodite et son amant Arès pour exposer aux Olympiens leur culpabilité et l’adultère de la déesse. Un filet tomba donc sur eux quand ils étaient au lit et exposa aux autres dieux leur nudité. Une ruse qui ne profita pas à Héphaïstos car la plupart des dieux envièrent Arès et eurent une aventure avec Aphrodite, flattée et reconnaissante de leur admiration. La déesse eut ainsi des enfants avec chacun, lui assurant une descendance assurée et nombreuse dans le monde des dieux. Les déesses, qui avaient aussi été invitées au spectacle, refusèrent, par pudeur. Chastes déesses, sans descendance autre que leur nom immortel…

A se demander pourquoi, avec autant de succès dans le monde qui lui a toujours reconnu sa place de déesse dont la beauté suffit à justifier son existence et l’immortalité de son nom et son image, elle éprouva le désir de faire autre chose que paraître pour se mettre à travailler de ses mains…

Cet article est la propriété du site Echodecythere. Il est interdit par le code de la propriété intellectuelle de le reproduire sans l’autorisation de son auteur.

Femmes, grenouilles et sorcellerie

Il existe un lien entre femmes, sexualité et grenouilles, si ce n’est, évidemment, entre sorcières et grenouilles.Comme d’habitude dans notre Occident chrétien, tout commence par un symbole païen positif dévoyé en diablerie. La grenouille était en effet un symbole de fertilité plutôt répandu.

Pouvant vivre à la fois hors de l’eau et dans l’eau, la peau imberbe, visqueuse et froide, elle a toutes les qualités pour évoquer le sexe, dans toutes ses caractéristiques. Et c’est loin d’être la seule chose fascinante – le fascinus est le sexe dressé pour les Romains, un très ancien symbole de protection qui a donné nos fascinant, fasciner, fascination, etc – On voyait aussi, semble-t-il, les grenouilles comme un symbole de transformation, de régénérescence, particulièrement chez les Egyptiens obsédés par la vie après la mort.

Les multiples formes de la grenouille, passant de l’oeuf au têtard – qui ne laisse rien présager de sa forme et sa couleur futures par cette couleur noire, la présence de cette queue et cette vie exclusivement sub-aquatique – sont à l’origine du symbole de transformation qui lui est associé. Plus étonnant encore, depuis l’invention du microscope, l’Homme a pu découvrir que la forme des têtards comme leur manière de se déplacer étaient très semblables à celles des spermatozoïdes, à l’origine de sa propre conception.

C’est donc clair : d’où qu’on porte nos yeux sur ses qualités, la grenouille semble nous parler le sexe sans jamais l’avouer. Mais de sexe trouble, mystérieux, toujours un peu teinté d’incompréhension, de sorcellerie ou de mystère. La forme même de la grenouille, toujours hésitante avec celle du crapaud, et qu’on ne distingue réellement qu’en les connaissant bien – se décline en symbole maléfique de luxure sur les façades des églises chrétiennes, ou protectrice de l’édifice sous la forme de gouttière dont le nom se rapproche du sien : la gargouille.

Crapauds et grenouilles se retrouvent également dans les recettes de médecine, mais aussi de magie populaire – elle-même dans une proximité trouble avec la médecine ancienne – et particulièrement dans les sorts d’amour ou de fidélité :

« Prélevé sur le côté gauche d’une grenouille, un osselet (…) qui, jeté dans l’eau, donnerait l’impression de la faire bouillir (…) ajouté dans une boisson, il exciterait l’ardeur amoureuse et les querelles; attaché au corps, il stimulerait le désir vénérien.« Pline. Histoire Naturelle, Livre 37

Une vertu aphrodisiaque avérée qui a été aussi scientifiquement démontrée lors du séjour d’une troupe de soldats français en Algérie : « Les effets des cuisses de grenouille ont été constatés sur une troupe de soldats français séjournant en Algérie durant le XIXe siècle. Alors qu’ils avaient consommé des batraciens capturés dans les marécages, ils furent victimes d’érections douloureuses et prolongées. » ( Aticle Le Point 2014)

En réalité, c’est la cantharidine – présente dans les coléoptères faisant partie du régime alimentaire des grenouilles et contre le poison duquel elles sont immunisées – qui avait eu cet effet, les cantharides étant un aphrodisiaque aussi efficace que potentiellement létal à trop forte dose.

Quoi qu’il en soit, les grenouilles ont souvent un lien avec la sexualité, et particulièrement celle de la femme : « Si l’on transperce des grenouilles avec un roseau, des parties naturelles jusqu’à la bouche, et qu’un mari trempe cette tige dans le sang menstruel de sa femme, cela dégoûte celle-ci de ses amants. » Pline Histoire Naturelle. Livre 37.

Une image peu ragoûtante qu’on retrouve incarnée littéralement dans le film d’animation Les triplettes de Belleville, où 3 anciennes stars françaises qui firent carrière dans l’Amérique des années Jazz croisent le chemin de Mme Souza, venue chercher son petit-fils – un cycliste enlevé par la French Mafia. En bonnes françaises caricaturées par l’oeil américain, leur régime est exclusivement constitué de grenouilles à tous les stades de leur développement, et parmi la variété proposée au menu figure une brochette de grenouilles transpercées « des parties naturelles jusqu’à la bouche », et servies par 3 vieilles femmes aux cheveux longs et blancs qui évoqueraient volontiers les sorcières de nos frayeurs d’enfants – qui furent celles auquel crut le Moyen-Age.

Il n’est pas une recette de sorcellerie historique ou imaginaire qui n’emploie un sortilège à base de crapaud ou de grenouille, dont certains spécimens sont effectivement toxiques et peuvent se révéler réellement efficaces pour faire périr les gens, comme ça arrive encore par le biais de la médecine chinoise contrefaite.

Outre cela, le croassement des grenouilles évoque toujours les bavardages féminins, surtout auprès des mares que furent les bénitiers, où leur présence ne fut jamais tolérée qu’avec suspicion. Finalement, sorcière, femme ou Français – qui fait peur par ses pratiques alimentaires -, ce qui les rapproche de la grenouille, c’est toujours l’altérité, le fait d’incarner cet autre qui fascine et qui fait peur en même temps par son étrangeté supposée.

(Photo à la Une : Echodecythere, autres photos : Sylvain Chomet. les Triplettes de Belleville. 2003 )

Cet article est la propriété du site Echodecythere. Il est interdit par le code de la propriété intellectuelle de le reproduire sans l’autorisation de son auteur.

Chypre, île d’Aphrodite

Avec l’évocation des poudres de Chypre, parfums anciens que je reconstitue dans la boutique du Labo de Cléopâtre, on peut dire que mes 2 blogs sont sous le règne de Chypre. Quand on parle d’Aphrodite, ceux qui connaissent la mythologie se souviennent qu’elle est née à Chypre, de l’émasculation d’Ouranos dont le membre rencontrait l’écume en tombant dans la mer, donnant naissance à la plus belle des déesses. Un récit mythique qu’on retrouve chez Hésiode, loin de toute évocation plus tardive d’une éventuelle filiation avec Zeus.

A Chypre, l’endroit exact de sa naissance est marqué par un rocher Petra tou Romiou, dit Rocher d’Aphrodite. Certains points de vue font d’ailleurs apparaître le rocher comme les organes génitaux coupés d’un géant.

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Dans l’Antiquité, puisque l’île était considérée comme le lieu de naissance d’Aphrodite, un grand sanctuaire lui était consacré – célèbre dans toute la région, notamment pour sa pratique de la prostitution sacrée – dont il ne reste que des ruines mais que chaque visiteur avec un rêve secret d’amour contribue à rendre encore vivant, et ce d’autant plus que d’anciennes coutumes restent vivaces. Des arbres à voeux ponctuent la route allant du rocher au sanctuaire d’Aphrodite, et une ancienne tradition recommande de plonger dans les eaux du rocher pour s’assurer de connaître un amour éternel.

Car en vérité, on ne plaisante pas avec la déesse de l’Amour et de la Beauté, et si on croit que son culte est tombé avec le triomphe du christianisme, c’est mal connaître le pouvoir d’une telle divinité et l’importance qu’elle peut avoir sur le destin des Hommes comme de tout ce qui est vivant. Pour preuve, les vestiges de l’île semblent démontrer qu’une déesse informe de la fertilité habitait déjà les lieux bien avant que l’époque classique fixe dans la statuaire la forme que nous lui connaissons bien et qui hante les musées.

Quand on regarde les commentaires de ceux qui suivirent la route d’Aphrodite, on voit de la déception : des paysages magnifiques, certes, mais finalement, rien d’inoubliable : une plage, un rocher, une baignade, une grotte, un jardin botanique plein d’espèces végétales en lien avec la mythologie, et le mythe d’Aphrodite en particulier; et quelques musées. Certes, pour un touriste habitué à voir des châteaux, des attractions, des spectacles et consommer de la culture comme on le fait des autres types de produits, un lieu dit sacré et mythologique – pour lequel on a dû faire des heures de randonnée sous un soleil de plomb – n’a pas grand-chose d’excitant.

Les montagnes, de l’Olympe à l’Himalaya, abruptes terres où vivent les dieux, nous sont bien connues à présent, malgré le danger qu’elles représentent encore, et chaque nouvelle ascension en diminue un peu le prestige et la dangerosité inscrits dans la mémoire collective de l’humanité. Les menhirs et autres mégalithes qu’on prenait autrefois pour des autels de géants ou des portes du monde des fées ont repris leur dimension humaine en même temps que progressaient les découvertes scientifiques et la reconstitution de plus en plus cohérente de l’histoire de la Terre.

Et pourtant, nous sommes les héritiers de ces homo sapiens, les hommes de sagesse qui se racontaient des histoires pour se créer une culture, des représentations communes, des attachements qui feront qu’on sera fiers d’être nés, attachés à une terre ou même tout simplement d’y avoir posé les pieds.

Mais le destin de Chypre est aussi dans sa partition : une partie nord de l’île étant occupée par l’armée turque, rappelant qu’aux temps des Troyens et des Achéens, la déesse savait provoquer les conflits pour la beauté et pour un territoire :

« Je chanterai Kythérée née de Kypros et qui fait de doux présents aux mortels. Son visage charmant sourit toujours, et elle porte la fleur aimable de la jeunesse. Saut, Déesse qui commandes à Salamis bien bâtie, et à Kypros entière. » Hymne homérique à Aphrodite. Traduction Lecomte de Lisle.

Enfin, Aphrodite, c’est aussi la déesse des parfums, ce qu’on sait peut-être moins, et Chypre est décrite comme une île odorante déjà par les auteurs de l’Antiquité, ce que va confirmer l’histoire des parfums qui la désigne comme une île des parfumeurs, entre Orient et Occident, grâce à la présence des plantes à parfum : ciste, myrte, mousse de chêne, roses, iris, origan. L’eau de Chypre, qui donnera ensuite la poudre de Chypre, puis les parfums chyprés, achevèrent d’associer la déesse, son île et les parfums.

Vous aimez Aphrodite et ne savez pas quoi faire pour vous rapprocher d’elle ? Renseignez-vous peut-être sur Chypre, l’antique déesse de l’Amour y a même sa route culturelle : La route culturelle d’Aphrodite

Nouvel article Labo de Cléopâtre : Poudres de Chypre

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Elégance et confinement

Allure sportive, véganisme, contrôle du poids, entraînement pour correspondre aux canons de la société, la femme occidentale a vu son style conditionné par des idéaux dépendant de certains paramètres qui n’existent plus en pleine crise de Covid 19, lequel risque de s’étendre.

Eclate alors un peu plus la vérité sur la valeur de nos codes esthétiques et idéologiques : soumis à des contingences extérieures, ils sont aussi fragiles que relatifs, obsolètes au moindre coup du sort.

Pourtant, cette notion de confinement n’est qu’une vue de l’esprit, qui prend des proportions d’autant plus grandes qu’on se focalise dessus. Or, ce qu’on oublie beaucoup, c’est que la vie des femmes, dans le monde, se passe essentiellement au foyer. Non pas qu’il soit particulièrement juste que depuis la nuit des temps, on leur ait attribué préférablement la sphère privée, mais notre culture s’est ainsi construite majoritairement, de la Méditerranée à l’Asie en passant par le Moyen-Orient, des pays de culture monothéiste primitive tout comme dans notre culture gréco-romaine – où les femmes ne sortaient jamais ou alors voilées, vivant au gynécée – ou la culture hindoue.

A la base de ce phénomène, une stratégie de survie pour protéger les êtres à la fois les plus fragiles et les plus indispensables comme une femme enceinte, sur laquelle repose la survie de l’espèce, une mère chargée de jeune enfant, une femme que son sang coulant plusieurs jours dans le mois rend décelable et qui excite l’agressivité les prédateurs potentiels à une époque où, la civilisation n’étant pas développée, elle ne pouvait en protéger suffisamment l’individu.

Devenue culture, la nécessité de base semble être devenue plus mythologique et tyrannique qu’elle paraissait peut-être moins justifiée dans des sociétés assez sophistiquées pour générer des défenses suffisantes contre les prédateurs.

Quand on regarde l’histoire d’une manière générale ou même sa propre vie, l’extrême mobilité qui caractérise la vraie liberté de mouvements est très rare, et quand ce n’est pas le cas, elle est souvent vécue comme une contrainte empêchant de voir la famille, de voir grandir les enfants, etc…Car bouger beaucoup coûte de l’argent, les déplacements les plus importants n’existant souvent que parce qu’ils en rapportent bien plus.

Par ailleurs, qu’on le veuille ou non et depuis toujours, le foyer reste le point d’ancrage de la famille et de la femme qui y investit souvent plus de sa personne. A l’heure d’une pandémie dont on ignore encore presque tout – et surtout si elle sera durable – il est plus que jamais urgent de s’en rappeler, non pour s’y contraindre, mais pour se rappeler d’y placer le plus possible son bonheur plutôt que sa frustration.

Alors, oui, c’est vrai, une garde-robe de ville devient obsolète. Habituée à un moi social engoncé dans des vêtements aux multiples coutures qui révèlent le corps pour lui faire jouer son rôle complexe – mais aussi le serrant – ces contraintes sociales qu’on accepte pour travailler ou quand on est en représentation sont refusées par le mental une fois chez soi. Car le foyer est le seul lieu autorisé d’une liberté plus grande, où on a le droit d’être soi-même, de relâcher les efforts, de tomber le masque social et se reconstituer après tant de luttes.

Pourtant, vêtements d’intérieur et élégance ne s’opposent pas forcément, à condition d’aller chercher l’inspiration dans les cultures où les femmes ont moins de réticence culturelle à vivre dans la sphère privée – c’est-à-dire majoritairement dans le monde – et où le vêtement, ne connaissant pas la frontière entre le dedans et le dehors pour nous faire consommer plus, propose à la fois des coupes et des matières confortables, naturelles le plus souvent. De l’Asie au Moyen-Orient, en passant par l’Afrique, c’est une multitude de vêtements inspirants, amples, naturels, confortables et aux styles infinis qu’on peut adopter et qui évitent le clivage entre le pantalon serré, la mini jupe étriquée et le jooging ou le pyjama multi-fonction.

L’Inde, les pays d’Asie du sud est comme le Vietnam ou le Cambodge proposent une infinité de pantalons et tuniques pour tous les jours, diversement colorés et aux motifs très élégants qui permettent aux femmes de sortir sans problème avec les vêtements qu’elles peuvent aussi porter à l’intérieur. Une tradition similaire existe aussi au Maghreb et au Moyen-Orient avec les caftans aux couleurs et motifs différents selon les régions, et qu’on peut trouver à des prix très abordables pour les jours ordinaires.

La même polyvalence se retrouve pour les kimonos dont certains, simples et légers, comme les yukatas, peuvent être portés à tout moment et pour des petits prix – contrairement aux kimonos de cérémonie – semblables à ça aux boubous africains qui peuvent être simples ou complexes selon l’occasion pour laquelle on les destine, mais qui seront pourtant toujours colorés et confortables.

Et bien entendu, les sarouels et pantalons harem, jusqu’à ceux conçus pour la danse orientale, associent au confort l’érotisme discret dont on retrouve la présence dans les tableaux orientalistes du XIX ème siècle, des Delacroix, Ingres et autres, l’Abyssinie de Rimbaud, les rêveries de hammam, et de façon plus lointaine, l’Orient de la propreté et des parfums ramenés de Croisades.

Enfin, dernier point précieux, par la beauté des tissus amples, simples et colorés qui laissent enfin l’esprit libre de l’exigence dictatoriale de la beauté du corps en représentation, l’élégance ne renonce plus au confort tout en cessant de devenir un tyran social imaginaire qui ne laisserait le choix qu’entre des « négligés » d’intérieur et des « habillés » « pour sortir ». Et ça pourrait faire beaucoup de bien à notre moral !

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Femmes d’Alger dans leur appartement. Eugène Delacroix. 1833

Dernier article Labo : Parfums des rois de France

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Enjeux d’une histoire de la beauté

Tout a commencé pour moi avec une coquetterie ordinaire de petite fille et d’un amour de la déesse Aphrodite qui ne s’expliquait pas. Une préoccupation quasi-sacrée qui n’a cessé de m’interroger, de m’émerveiller tout au long de ma vie. Un souci condamnable quand vous faites des études, car trop entaché de préjugés de superficialité. Face à la condamnation, soit on culpabilise, acceptant le jugement, soit on continue. Pas très influençable, j’ai continué jusqu’à créer ce blog, consacré à la déesse et aux questionnements autour de son domaine.

Bien m’en a pris, en vérité, car celui-ci m’a conduit bien plus loin que tout ce que j’aurais pu imaginer, et dans des voies qui ont été tout sauf passagères et de façade. Le fait est que la beauté ne peut être un objet superficiel, mais au contraire essentiel à toute civilisation, la civilisation qui se veut savante, mais aussi celle qui cherche son histoire.

Dans l’Histoire de la Beauté de Georges Vigarello, c’est autant l’histoire de la mode, la conception du féminin au fil des siècles que celle des mentalités et des aliénations, qui nous sont racontées en même temps. Tant il  n’est pas possible de faire l’histoire d’une problématique humaine d’une telle importance sans rejoindre les aspects les plus fondamentaux d’une société.

Lucrèce ne s’y trompait pas, lui qui, en épicurien tenté par une forme d’agnosticisme, avait malgré tout mis Aphrodite au rang de seule divinité dont tout procédait. Dans tout le vivant, en effet, et d’un point de vue initial, la beauté esthétique est signe de santé, quand un aspect repoussant signe carences, usure, maladies, vieillesse – autant de signes distinctifs qui rappellent à qui veut vivre, qu’il faut passer son chemin. Là où les animaux ont également un odorat développé pour les renseigner, l’Homme ne possède presque plus que la vue. La beauté est donc à la base, une question de survie de l’espèce.

Un enjeu qui se voit confirmé dans notre étonnement face aux Vénus du Néolithique qu’on est surpris de voir obèses quand nous n’apprécions plus que la minceur, mais qui manifeste sûrement d’un goût pour les vivantes, celles dont le corps fut assez solide pour survivre et assurer la survie de ses descendants. Car dans les situations de vie très difficiles comme l’était celle des premiers humains, la femme qui vit, survit, porte les enfants, les nourrit et garantit leur santé, c’est celle qui stocke le gras pour en faire des réserves lors des périodes de famines, très courantes et souvent fatales à cette époque.

Le corps idéal garant de la survie s’est ainsi inscrit dans la pierre, débutant du même coup une histoire de l’art dans laquelle l’évolution du corps des femmes surtout – mais aussi des hommes – raconte en creux l’évolution des sociétés, de leurs techniques de survie, de leurs réflexions philosophiques sur la place de l’un et l’autre sexe, la santé, et les techniques d’ornementation, d’art et d’artisanat. Un biais choisi par Umberto Ecco pour ses histoires de la beauté et de la laideur, qui passe par l’histoire de l’art et une véritable érudition pour lire l’histoire occidentale à travers le corps représenté, exposé et conservé comme moyen d’expression de choses signifiantes pour une époque.

Une importance pourtant contestée du point de vue de la civilisation où sciences et techniques sont privilégiées car seules elles permettent à la société d’avancer vers plus de connaissances, de développement, d’espérance de vie, de santé et de bonheur potentiel. Alors, la beauté, dans tout ça ? Et bien, en tant qu’artifice, en se jouant des codes de plus en plus complexes, la beauté construite, élaborée, est d’abord un langage culturelle à fonction sociale très élaborée, où la mise en scène est le moyen que trouvent certaines intelligences pour jouer avec les règles sociales, prendre parfois une place qui ne leur semblait pas destinée et se forger un destin personnel.

C’est l’histoire des grandes maîtresses royales, de la danseuse Théodora devenue reine de l’Empire byzantin, de Ninon de Lenclos, qui passait pour avoir de jeunes amants jusque fort tard, et de toutes les chanteuses et actrices, qui, vieilles encore, étaient toujours sublimées pour leur art et leur maquillage.

Mais l’histoire de la beauté, c’est aussi celle d’une magnifique aliénation et des inégalités sociales entre les hommes – dont on juge de la valeur sur les critères d’intelligence et d’action dans le monde socio-politique – et les femmes, à qui on demande d’abord d’être belles pour accepter de leur concéder, éventuellement, un peu d’intérêt – pourtant toujours minoré socialement, si ce n’est dévoyé pour les plus pauvres et les plus fragiles.

Car au fond, la beauté, sur l’ensemble de l’histoire humaine, c’est une esbroufe : un souci qui permet aux femmes de provoquer le désir, en vue de se faire épouser ou de réussir dans le seul espace qu’on leur a concédé en les sur-occupant à des choses futiles qui ne peuvent nourrir le cerveau de connaissances et de compétences aptes à leur donner une place dans le monde. Et tandis qu’hommes et femmes reçoivent désormais la même éducation, prisonniers de ces représentations culturelles plusieurs fois millénaires, ils n’en reçoivent pour autant ni reconnaissance ni privilèges à égalité.

Alors, une histoire d’inégalités, l’histoire de la beauté ?

Mais oui, tout comme une histoire de survie, de mode, d’art, de mentalités, d’amour, de sexualité, de construction identitaire et une histoire politique.

Tout cela serait-il donc sans importance ? J’ai beau être une femme, j’ai bien conscience qu’un système qu’on a fait perdurer pendant des millénaires ne peut être considéré comme superficiel, à moins de vouloir se leurrer soi-même ou leurrer les autres..

Cet article et ces photos sont la propriété du site Echodecythere. Il est interdit de les reproduire sans l’autorisation de leur auteur.

Le labo au festival Fous d’histoire nov. 2019

Marché de l’Histoire, Compiègne (60)

16 – 17 novembre 2019

Vous suivez, aimez ce blog et connaissez mon artisanat, mon projet, mes recherches et ma boutique sur Etsy ? Peut-être même avez-vous déjà acheté une de mes senteurs de reconstitution ou une senteur inspirée des connaissances et des croyances des gens de
l’Antiquité.
Si vous passez par Compiègne et ses environs ou êtes tout simplement pas loin de l’Ile-de-France, le week-end du 16/17 novembre 2019, je vous attends avec une sélection de produits artisanaux, tous conçus avec ma tête et mes mains, dans une aventure qui a commencé ici-même, par mes blogs WordPress.
Je vous y proposerai encens, parfums poudreux de recettes anciennes, parfums huileux faits uniquement à la main, sans huiles essentielles, et selon les recettes et techniques données par Dioscoride et Pline. Je vous y proposerai aussi des kyphis, bien entendu, les encens emblématiques et très sacrés de l’Egypte ancienne  qui étaient spécifiquement brûlés le soir devant les divinités. Je vous proposerai aussi des coffrets thématiques – appropriés pour des cadeaux raffinés et originaux – et des senteurs d’autres traditions dont les effets bien-être vous surprendront.

 

Mais il y aura aussi les derniers nés : les pendentifs parfums primitifs, aux senteurs brutes et sans liquide à porter comme des bijoux, les poupées de soucis aux plantes amérindiennes et le khôl parfumé d’après la recette de Dioscoride qu’on retrouve ensuite chez Pline.

Ce sera également pour moi l’occasion de vous voir, pour vous d’aborder les produits dans la réalité de leur taille, leurs couleurs, matières, et plus encore leurs odeurs, et le tout par civilisation.
Globalement, la culture antique, surtout gréco-égyptienne est la plus représentée dans ma boutique, mais vous trouverez aussi quelques senteurs indiennes, judeo-chrétiennes, et l’efficacité surprenante et les parfums de quelques plantes ancestrales vikings et amérindiennes.
Alors, je vous attends ici, avec beaucoup de plaisir, le week-end du 16 au 17 novembre 2019 :
LE TIGRE
2 RUE JEAN MERMOZ
MARGNY-LÈS-COMPIÈGNE
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Cet article et photos sont la propriété du site Le labo de Cléopâtre. Il est interdit de les reproduire sans l’autorisation de leur auteur.
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Quelle déesse êtes-vous ?

Non, ce n’est pas un titre destiné à flatter votre ego ou un énième test de la presse féminine.

L’importance des mythes dans la structure de notre personnalité comme construction à la fois individuelle et inconsciemment collective a été soulignée par les psychanalystes – au premier rang desquels Freud – et les philosophes, qui ont puisé des ressources pour révéler certains complexes, archétypes ou problèmes psychologiques – complexe d’Oedipe, d’Electre, syndrome de Cassandre, etc..-

Des problèmes de construction identitaire qui paraissent universels, tant on peut les généraliser, et qui pourtant s’avèrent en réalité civilisationnels. Si bien qu’au Japon, le complexe d’Oedipe n’existe pas et essayer de le traiter est inutile, mais qu’on y trouvera le complexe d’Amaterasu, leur déesse du soleil. Et pour cause..

Dans le Sciences et Avenir consacré il y a quelques années aux mythes, on apprenait que l’informatique, mise au service de l’anthropologie, avait révélé une trame commune à beaucoup d’entre eux, à partir d’un récit initial plus ancien que l’invention de l’écriture. De ce récit initial, des variantes découlaient au fil des grandes migrations humaines. Nos mythes sont ainsi notre mémoire collective en même temps que notre socle identitaire à  la fois commun et variant.

Une donnée que nous voulons oublier et dépasser dans une société moderne qui ne croit plus aux mythes. Pourtant, nous gardons la même structure que nous n’avons pas réussi à dépasser même en passant par le monothéisme. Logique quand on sait qu’en tant que récit, il est uniquement dévolu à une seule cause : la révélation et reconnaissance du Dieu unique par les prophètes, saints, et figures ancestrales.

Pourtant, comme l’Inde traditionnelle considère la période de vie sociale d’un homme en fonction des doshas ( terre – apprentissage – Feu – vie active – air – détachement et vie spirituelle ), l’Europe occidentale a pu avoir sa période de vie sociale féminine dominée par ses déesses emblématiques qui en sont les archétypes.

  • Artémis, l’enfance indomptable

Quand les jeunes filles grecques allaient se marier, elles sacrifiaient d’abord leurs jouets à Artémis en signe de renoncement à leur enfance, leur nature sauvage et leur virginité. Artémis n’était en effet pas qu’une déesse chasseresse : elle avait surtout fait le voeu de rester vierge, de vivre à l’écart, dans la forêt, entourée de jeunes filles comme elle. Artémis, c’est une sauvage, une fille indisciplinée qui a refusé le joug de la société et les lois sociales qui lui imposent de prendre sa place. Elle va rester éternellement et volontairement une jeune fille refusant de quitter son aire de jeux.

Mais si la jeune chasseresse reste indocile par nature divine, ses compagnes ne sont pas aussi bien protégées, notamment contre l’Amour et le désir des hommes qui représentent le plus grand danger et ce qui provoque le plus la colère de la soeur d’Apollon. Artémis, c’est donc la petite fille ou la jeune fille, non encore opprimée par les obligations sexuelles et sociales, celle qui, dans la cour de l’école ne fréquente pas les garçons, car de toute façon, elle ne les aime pas., et qui, lorsqu’elle rentre de l’école fait le récit, agacée, de toutes les bêtises dont ils sont capables.

  • Aphrodite, l’âge de la sexualité

Aphrodite était autant la déesse de  l’Amour, du désir, de la séduction, de la sexualité que de la prostitution. A partir du moment où on entre dans le domaine de la séduction et de l’attirance sexuelle, on est sous la domination d’Aphrodite. Dans le cadre normé de la vie d’une fille de citoyen, la sexualité féminine n’était concevable que dans le cadre du mariage. C’est pourquoi la déesse de l’Amour est également associée à ce rite de passage fondamental dans la vie d’une femme de bonne famille. Mais pour ses aspects amoureux et sexuels uniquement : « les travaux d’Aphrodite » comme disait Hésiode.

Sappho, bien connue pour ses poèmes d’amour lesbiens, était éducatrice pour jeunes filles de l’aristocratie, qu’elle préparait au mariage. Cette institution était sous le patronage d’Aphrodite, également déesse de prédilection de Sappho qui n’a malgré tout laissé aucun écrit sur la nature de l’enseignement qui s’y déroulait, mais qui était destiné à préparer les jeunes filles à leur future vie d’épouse. Aphrodite, c’est la femme dans tout son pouvoir de séduction.

  • Héra, la matrone dans un monde inégal

On a souvent moqué Héra pour sa jalousie. Elle est l’archétype de la femme mariée, mère de famille, qu’on dira respectée, qu’on envie pour sa situation élevée dans la société, mais qui va malgré tout souffrir des infidélités de son mari qui la ridiculisent et mettent l’accent sur sa perte de séduction. Une caricature, Héra ? Malheureusement, presque une obligation dans un monde de rivalité sexuelle et sociale où, même quand la femme est puissante, voire, la mère des dieux, elle ne peut, contrairement à son mari, jouir de la liberté de son corps, de ses activités, de sa libre circulation.

Finalement, ce qui lui est reconnu, c’est le droit d’être jalouse et mécontente. Et de fait, Zeus le lui reconnaît comme un droit.  Il ne frappe pas sa femme, ne la brutalise pas, lui reconnaît son rôle et tente de lui cacher ses amantes sans jamais tenter de la détrôner au profit de l’une d’entre elles. Coincée dans une vie qu’elle sait être aisée et opulente, le statut le plus élevé parmi celui des femmes, Héra est la femme qui a réussi dans le cadre normé de la société patriarcale, mais malheureuse des inégalités qu’elle doit subir pour y avoir droit.

Finalement, il n’existe d’archétype, de déesse ou femme mythique que dans le cadre d’une société qui les a fait apparaître par ses règles. Une fille trop jeune pour subir les lois sociales, qui découvre son pouvoir de séduction et la sexualité avant de subir des devoirs plus que des droits, voici l’histoire des femmes occidentales dans la norme.

Bien sûr, d’autres figures apparaîtront, que nous connaissons toujours : Athéna, l’intellectuelle ou femme de pouvoir qui ne veut pas se marier, seul moyen, selon elle, de pouvoir réaliser ses ambitions, Cérès, qui, mère célibataire, vit plus durement que si elle avait été entourée ou avait eu plus d’enfants, la disparition de sa fille unique, etc.

Dernier article du Labo : Le cérat

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Danse et séduction

Un article a déjà été consacré à la danse sur Echodecythere, quand j’ai évoqué les particularités du sambar et du lembeul, des danses africaines de séduction mettant en avant les fesses, dans un monde polygame hyper-concurrentiel dans lequel les hommes aiment les formes.

Pourtant, sans parvenir à ces extrêmes d’érotisme et de suggestion, on constate qu’il y a malgré tout souvent un lien entre danse et séduction, et ce de façon universelle. Il faut dire qu’il y a une certaine similitude entre la danse – mouvements du corps pour exprimer le rythme, la musique, en dehors de toute autre finalité – et la poésie ou le chant, où les paroles ne sont créées que dans le but de transmettre une émotion en échappant à ses fonctions de communication habituelle.

Dans un monde où l’Homme utilise depuis toujours le langage, le mouvement et les sons dans le contexte de la nécessité – communication, échange d’informations, action sur le réel, lutte pour sa survie – chant et danse sont apparus dans les premiers temps comme des grâces spéciales, des instants hors du temps qui reliaient les Hommes au divin, les instruments de la nécessité ayant été transcendés pour faire du Beau, de l’unique, du magique.

Musique, danse et chant ont d’ailleurs été d’abord consacrés aux dieux ou au lien avec l’Invisible, comme ils continuent de l’être dans les sociétés traditionnelles. Chants, musiques et danses des pow wow, des transes gnawa pour se purifier des djinns, Bharata Natyam indien – qui rejoue les mythes, la geste des dieux et leurs amours à travers la danse sacrée – danses guerrières africaines ou arabes, transes soufies, tous témoignent de pratiques hors du temps au moyen de médias communs – la voix et le corps – qu’on a purifiés de leur usage rituel pour leur faire toucher les cieux.

Le mot chant lui-même conserve dans son étymologie, le souvenir de la magie à laquelle il est lié à l’origine puisqu’il dérive du mot « carmina » – le charme dans le sens de sort, d’ensorcellement.

Par la même logique, la danse offre ce moment intemporel où le corps, libéré des contraintes ordinaires, épouse la musique pour trouver sa propre expression offerte au regard de l’autre. Dans tous les arts, bien sûr, il y a une dimension d’échange avec l’autre. L’art est fait pour être vu, entendu, il est une offrande au monde. Mais pour celui qui danse sans contrainte, c’est d’abord l’expression d’une liberté incontrôlable, comme dans l’épidémie dansante de Strasbourg en 1518.

La danse, révélatrice d’un potentiel de grâce, de corps libéré de ses contingences sociales pour épouser le rythme de la musique et trouver celui de son propre abandon, a forcément quelque chose de  dangereusement sensuel, particulièrement dans les sociétés où on veut contrôler les corps. Cette liberté instinctive, ce naturel dans le fait de d’épouser le rythme de la musique se retrouve rarement dans une existence humaine, sauf dans la relation sexuelle, où le corps doit caler son rythme sur celui de l’autre, sur son propre désir, mais ni sur son travail ni sur ses devoirs ordinaires.

Dès lors, comment s’étonner de ces passions nées pour des danseuses, nombreuses dans l’histoire et la littérature, de ces interdictions dans le monde musulman de la danse orientale en public pour une femme à moins d’être étrangère, de la réduction de la danse indienne à de la prostitution par les Anglais qui les colonisaient, etc ?…Que dire de ces scènes d’amour, de coups de foudre qui commencent par un bal, comme dans la Princesse de Clèves, Roméo et Juliette, le Tombeau hindou, West Side Story et jusque dans leurs parodies malheureuses comme Madame Bovary qui se termine sur un banal adultère, l’endettement et le suicide…Louis XIV lui-même exerçait ses talents de danseur pour séduire et captiver une cour de nobles à laquelle il voulait retirer le pouvoir de décider et d’agir.

Dans la Bagavadh Gita, Krishna prévient : »De la contemplation de l’objet des sens naît l’attachement. » Un phénomène bien plus trouble quand cet objet des sens est le corps d’un autre, de cet autre qui révèle, en même temps que sa liberté de mouvements désaliénés du quotidien, du banal, de l’insignifiance, la beauté de son rythme, son rapport à son propre corps, et une idée de ce qu’il promet, tout d’un coup dévoilés.

Faire tomber un homme amoureux en dansant ? La marque du destin pour Nandini, déjà amoureuse de Sameer, un élève de son père, dans le film indien Hum Dil De Chuke Sanam..

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